Pastorale américaine est le premier roman de la trilogie américaine (reprise récemment, et augmentée du complot contre l’Amérique, en Quarto sous le titre L’ Amérique de Philip Roth) et l’un des neufs (le sixième) mettant en scène l’écrivain alter ego de Philip Roth, Nathan Zuckerman.
Dans le quartier, il y avait un enfant qui surclassait nettement les autres, il était le meilleur en sport, rendait les filles folles et ressemblait si peu aux autres qu’ils l’appelaient le Suédois. Bien des années plus tard, les chemins si différents – l’un en ligne droite et l’autre tortueux – du Suédois le côté clair et de Zuckerman le côté sombre vont à nouveau se croiser.
Ce fut la seconde raison pour laquelle je répondis à sa lettre, ce substrat. Quel genre de vie intérieure avait-il eu ? Est-ce que quelque chose — et quoi — avait jamais menacé de déstabiliser sa trajectoire ? On ne traverse pas la vie sans être marqué par la mélancolie, la douleur, le désarroi, le deuil. Même ceux qui ont eu une enfance comblée finissent par avoir leur part de malheur obligé, voire davantage.
La rencontre entre Zuckerman le torturé et ce modèle de réussite, c’est l’enjeu du début du roman. Que va-t-il trouver derrière cette façade de marbre blanc ?
Tu cherches des profondeurs absentes. Ce type est l’incarnation du néant. Je me trompais. Je ne m’étais jamais trompé à ce point sur quelqu’un.
Zuckerman est au crépuscule de sa vie, le spectre de la mort rode. La réunion des anciens de l’école n’est qu’un bal macabre, une réécriture du “Bal des têtes” de Proust.
Philip Roth est l’un des plus grands auteurs américains, avec le personnage de Nathan Zuckerman il a créé un anti-héros profond et complexe cristallisant sa part sombre. Le romancier cherche la faille, le moment où cette belle mécanique s’est enrayée. Ce qui est lisse, plat ne l’intéresse pas, il cherche les aspérités. Le récit commence et on ne sait plus au bout d’un certain temps distinguer ce qui est romancé de ce qui ne l’est pas. Le roman est dur, l’écriture tape fort et ce n’est pas toujours agréable à lire. Pourtant le talent de Philip Roth prend ici toute son ampleur.
Philip Roth, Pastorale américaine, traduit par Josée Kamoun, Gallimard, 2001.