David Van Reybrouck a publié en 2022 un nouveau livre consacré à l’Indonésie, Revolusi1. Cette sortie m’a fait penser à son livre précédent, Congo qui avait été largement salué par la critique lors de sa sortie. A l’époque, le sujet ne m’intéressait pas, mais depuis ma lecture des livres de Jean Hatzfeld, je m’intéresse de plus en plus à l’Afrique et je me suis dit que c’était l’occasion – d’ailleurs j’ai retrouvé dans ce livre une partie de l’histoire du génocide rwandais, la traque des réfugiés Hutu au Congo. Et je comprends maintenant pourquoi ce livre a recueilli autant de louanges. Il embrasse toute l’histoire du Congo (le pays qui porte désormais le nom de République démocratique du Congo) depuis l’arrivée des premiers explorateurs jusqu’à celle des entreprises chinoises. Entre temps il s’est passé beaucoup de choses et il reste le goût amer de ce qui ressemble bien à un terribles gâchis. Le livre est une somme (~600 pages en grand format et ~800 en poche) et pourtant la lecture est passionnante de bout en bout. Comment l’historien et archéologue fait-il pour accrocher le lecteur avec un livre qui se veut être avant tout un livre d’histoire ?
Il y a l’érudition impressionnante – passage obligé pour un livre d’histoire –, mais aussi un vrai talent d’écrivain avec un style moderne qui ne cède rien à la précision, mais surtout sa capacité à dynamiser le récit en fusionnant deux disciplines ayant des temporalités différentes que sont le journalisme et l’histoire. Ses enquêtes sur le terrain, son intelligence géopolitique insufflent de la vie à cette histoire du Congo. C’est brillant, j’ai rarement eu de l’occasion de lire un livre de ce niveau.
Que retient-on après la lecture d’un tel livre ? Un pays grand comme l’Europe de l’ouest pourvu d’énormément de ressources est aujourd’hui l’un des plus pauvres au monde toujours en proie à une instabilité politique et à une violence qui ne cesse de faire des victimes. Le pays ne s’est jamais remis d’une colonisation qui a mis en oeuvre l’exploitation systématique du pays qui n’était alors peuplé que de tribus en maintenant volontairement les habitants à un faible niveau d’éducation et qui a pris fin en un éclair laissant le pays aux mains de responsables au mieux inexpérimentés au pire avides de pouvoir. Je ne suis pas un spécialiste de la colonisation, mais il me semble que cette histoire du Congo est un exemple symptomatiques des ravages qu’elle fait dans son sillage. Je vais reprendre un peu mon souffle avant de m’attaquer à Revolusi. Pour ceux qui n’auraient pas le courage de se lancer dans la lecture de plusieurs centaines de pages, Eric Vuillard propose des versions de l’histoire très condensées, il a lui aussi écrit son Congo 2.
Van Reybrouck, David. Congo, une histoire . Actes Sud, 2012.