Après la sidération racontée dans Catharsis vient le temps des souvenirs et de la nostalgie. Luz nous fait revivre les bons moments, la grande époque de la rédaction de Charlie Hebdo. Des moments qu’il évoque en se mettant en scène lors d’une nuit d’insomnie, sous un trait différent réalisé au pinceau. Tous les collaborateurs du journal sont très bien croqués – il faut dire qu’il les connai[ssai]t par coeur et qu’il avait dû les dessiner un nombre incalculable de fois. Dans le lot, et même si ce n’est pas le seul, Cabu rendu en quelques traits est génial. Son statut de papa de la rédaction, de mentor de Luz, le respect que les autres ont pour lui, n’en est que plus émouvant.
Ces moments au sein de la rédaction, en reportage ou en dédicace – j’y reviendrai – sont excellent et oscillent entre rigolade et nostalgie avec en point d’ancrage inamovible l’amour du dessin. La nostalgie pourrait dominer car les principaux protagonistes ont disparu dans les circonstances que l’on connait et cette époque avec eux. Pourtant, c’est la rigolade qui domine et Luz ne revient pas sur l’attentat pour mieux nous faire revivre de l’intérieur l’ambiance du journal, ce qui faisait l’esprit de Charlie Hebdo, son absence de ligne rouge à ne pas franchir que l’on pourrait résumer par: on peut et on doit rire de tout – la scène durant la dédicace à Angoulême en est la parfaite illustration. Luz, tel un conservateur de la mémoire du journal, est parvenu à en sauvegarder l’essence de telle sorte que rien ne pourra jamais l’effacer – c’est la définition d’indélébile non ? – et on l’en remercie infiniment.
Luz. Indélébiles. Futuropolis, 2018.