Je me souviens très bien avoir emprunté à la bibliothèque gérée par le CE de mon premier employeur un titre qui m’avait intriqué, La Boîte noire1. Je ne savais pas du tout ce qu’il y avait à l’intérieur – je m’étais dit que ça devait être le concept. Et j’ai découvert un univers extrêmement complexe que je ne connaissais pas du tout – mais alors pas du tout. Il était question de flux financiers entre des comptes hébergés un peu partout autour du globe, des listings, du blanchiment d’argent. J’étais loin de tout cela, ma seule connaissance était l’informatique – c’était déjà mieux que rien. Mais je me souviens d’avoir paradoxalement été attiré par cette complexité, par cet univers. Ce travail de fourmis de David contre Goliath était l’oeuvre d’un journaliste dont le nom sera pour toujours associé à la société Clearstream, Denis Robert.
Bien des années après, j’ai repéré ce pavé lors de sa sortie en édition intégrale et l’avais offert à mon père pour son anniversaire. Je l’ai malheureusement récupéré depuis et, après avoir laissé passer un peu de temps, j’ai entrepris de le lire. Il faut tout d’abord saluer le travail qui a été réalisé par les auteurs, Denis Robert et le dessinateur Laurent Astier. Non seulement sur le plan documentaire puisqu’il retrace au-delà de ce qui a été appelé l’affaire Clearstream une grande partie de la vie du journaliste, de la découverte de cette “anomalie” en passant par tout le processus qui l’a fait devenir une affaire, qui l’a fait gonfler jusqu’à ce qu’elle parvienne au sommet de l’état et qu’elle explose au visage des politiques en un procès sur-médiatisé. La forme tout en noir et blanc se prête parfaitement à l’histoire. Chaque début de chapitre est soigneusement illustré et agrémenté d’une citation. Le travail effectué pour recoller les morceaux et les présenter sous une forme compréhensible, digeste et même agréable à lire est remarquable. Prévoyez tout de même un peu de temps si vous voulez vous plonger dans la machine à blanchir l’argent, 700 pages, même en BD ça prend quand même un peu de temps.
Denis Robert & Laurent Astier, L’Affaire des affaires - Clearstream, Dargaud, 2015, 704 p, Amazon.