Avant de lire ces livres, je savais que les relations entre les États-Unis et le Moyen-Orient étaient complexes, mais je n’imaginait pas qu’elles l’étaient à ce point et depuis si longtemps. Depuis les premiers conflits liés à des actes de piraterie il s’est passé des choses: Israël et la guerre quasi permanente avec ses voisins, les liens avec L’Arabie Saoudite, le théâtre de la guerre froide avec la Russie, la guerre en Irak, le post 11 septembre et Al-Qaida et enfin le printemps arabe et toutes ses conséquences – et j’ai oublié beaucoup de choses. Le Moyen-Orient est stratégique de par son positionnement et son sol recèle le bien le plus convoité du siècle précédent: l’or noir. Cette série passe en revue plus de 200 ans d’histoire pour en décrire les évènements majeurs.
Sur la forme maintenant. J’adore David B.. Ses dessins, surtout lorsqu’ils illustrent des motifs orientaux me font toujours rêver. Je suis conquis par ce style dont un signe distinctif est l’énorme turban qui coiffe la tête de certains personnages. Ils m’avaient déjà frappé dans Les Chercheurs de trésor1 – que je conseille vivement au passage. Dans le contexte de ce type de livres, ils sont particulièrement adaptés. Par contre, et c’est l’un des travers de cette série, ils illustrent plus qu’ils ne racontent. Leur apport est bien plus artistique qu’explicatif – à la différence par exemple des dessins employés par Scott Mccloud dans ses oeuvres théoriques qui ont pour but d’expliquer plus que d’illustrer. Ils viennent en appui du texte de Jean-Pierre Filiu, universitaire spécialiste de l’Islam contemporain, pour illustrer, souvent en une case, le propos. Ils sont toujours bien inspirés, très bien réalisés et originaux, mais ils ne font qu’illustrer une phrase, ils ne s’enchaînent pas, il n’y a donc pas de séquence ce qui est le fondement de la bande dessinée.
D’ailleurs les propos sont parfois difficiles à suivre tant le sujet est complexe et tant les histoires s’entremêlent. Profiter des illustrations pour afficher quelques cartes aurait été une aide appréciable pour le lecteur – au moins pour moi. Mais passé ces petit défauts il faut reconnaître que ces ouvrages – il existe trois tomes – sont captivants. Ils offrent une perspective marquante sur cette plaie ouverte qu’est le Moyen-Orient et sur la responsabilité des grandes puissances – et pas que les États-Unis – dans ces drames humains. Dans cette histoire malsaine, même le retrait des troupes décidé par Obama qui pourrait ressembler à un happy end a un goût amer. Après tout cela, qu’elle nouvelle page de cette sanglante histoire écrira Donald Trump …
Obama sanctionne la fin d’une longue histoire de l’Amérique au Moyen-Orient. Elle n’est pas toujours intervenue pour de bonnes raisons, mais elle s’en retire au pire moment. Alors que du Pakistan à la Libye, de la Turquie au Yémen les populations sont en proie à la guerre, à la faim, à l’exil et à un terrorisme qui atteint l’Europe et les États-Unis.
David B. & Jean-Pierre Filiu, Les meilleurs ennemis: Une histoire des relations entre les Etats-Unis et le Moyen-Orient., Futuropolis, 2011, 120 p, Amazon.