Tyler Cross n’a aucun sentiment. Il a le sang froid comme un serpent. Enfin peut-être en a-t-il, mais il les cache bien en tout cas. On ne peut pas mieux le définir qu’en citant ce qui est inscrit sur la couverture du livre :
Un jour, Tyler Cross paiera pour ses crimes. En attendant, il en commet d’autres.
Je n’avais jamais lu un tel hybride entre polar et western. Ici le scénario va faire s’entrechoquer ces deux mondes et leurs codes respectifs. Ce n’est certainement pas un hasard si l’histoire se déroule dans ces années 50 qui sonnent la fin de l’époque western et le début de l’âge d’or du polar. On assiste à un passage de témoin explosif en forme d’hommage entre ces deux genres majeurs. Le gangster venu de la grande citée va se retrouver au milieu de nulle part, dans ce qui ressemble à s’y méprendre à la petite ville typique du Far West. Sa rue principal avec sa banque, son saloon et son shérif.
C’est un énorme terrain de jeu concocté par Fabien Nury qui laisse assez de place à Brüno pour exprimer tout son art. Il faut dire qu’il connaît les sujets puisqu’il s’est essayé, avec succès, à ces deux genres avec Inner City Blues1 pour le polar et Junk2 pour le western.
Brüno est l’un de mes dessinateurs préférés – et je me dois de parler de son dessin même si je ne dispose pas du bon vocabulaire. Il a réussi à imposer son style qui est reconnaissable immédiatement. Il est à la fois épuré et très expressif et je ne connais pas d’équivalent. Il réserve une place importante à la couleur qui est appliquée de façon très sobre (des aplats) même si la palette est variée et toujours très travaillée et bien choisie.
Si vous aimez les polars et/ou les westerns – ou même si vous n’aimez aucun des deux – lisez ce livre.
Fabien Nury et Brüno, Tyler Cross #1, Dargaud, 2013, 96 p, Amazon.