Quand un membre de la famille meurt, il est conduit de la maison au cimetière par un chemin particulier, que l’on appelle le chemin des morts. Chaque maison, chaque famille a le sien. Il ne se confondent pas. Si bien qu’au-dessus des routes et des sentiers du village, ou au-dessous d’eux, ou à côté comme on voudra, il y a d’autres chemins, invisibles, formant une toile dont l’église est le centre.
Lorsqu’à 25 ans, François Sureau siégeait à la commission des recours des réfugiés (commission chargée d’examiner les dossiers présentés par les demandeurs d’asile dont la demande à été rejetée par l’office française de protection des réfugiés et apatrides), voici ce qui arriva :
[…] Giscard avait décidé de retirer le statut de réfugié aux Basques espagnols vivant en France au motif que, L’Espagne étant devenue une démocratie, il n’y avait aucune raison de maintenir aux Basques la protection qui leur avait été accordée autrefois.
Parmi les cas qui tombèrent sous le coup de cette décision, se présenta celui de cet homme : Ibarrategui.
Ce court récit est une belle preuve d’honnêteté intellectuelle. Il faut avoir du courage pour revenir sur ces moments douloureux après tant d’années pendant lesquelles le souvenir de cet homme ne l’a pas quitté. Il ne faut pas les enfouir car ils finissent toujours par remonter à la surface. Il vaut mieux en parler car c’est certainement le meilleur moyen – s’il en est un – pour que ces blessures cicatrisent.
Le texte est sobre, sincère et beau, l’anaphore qui conclut le livre est magnifique.
François Sureau, Le chemin des morts, Gallimard, 2013, 64 p, Amazon.