Un livre peut-il être périmé ? En lisant Glamorama, il semblerait que la réponse est oui. Je ne sais pas s’il pourrait être lu par une personne ne se trouvant pas dans la bonne tranche d’âge. C’est-à-dire quelqu’un qui avait entre 20 et 30 ans dans les années 90. Comment alors ne pas être submergé par la liste pléthorique – jusqu’à l’indigestion – de célébrités (people) citées. Bret Easton Ellis a atteint le seuil ultime du name dropping, il a établi un record. Heureusement – ou pas – je suis dans la tranche d’âge éligible et je n’ai donc eu aucun mal à me souvenir des quelques peoples tombés depuis dans les oubliettes du star system – qui se souvient aujourd’hui du groupe suédois Ace of Base ?

L’intrigue est bien menée grâce à deux ressorts scénaristiques. Le premier est l’attente d’un évènement. Victor prépare l’ouverture d’une boîte de nuit, nous suivons donc avec impatience, et un peu d’inquiétude, les préparatifs et sommes en attente, fébriles, de l’apogée: la soirée d’inauguration. Le second est matérialisé par les menaces qu’il subit. Il faut dire qu’il n’est pas au mieux avec son patron actuel, disons qu’il n’est pas très réglo avec lui et que si le dénommé Damien l’apprenait, le retour de manivelle pourrait être très violent - disons directement dans la tête. Enfin, pour couronner le tout, sa vie amoureuse est un peu mouvementée ce qui pourrait à la longue lui valoir quelques déboires. Puis l’intrigue prend une tournure plus noire et inquiétante mais je n’en dirai pas plus.

Tout ça a l’air assez sympa, mais le problème est ailleurs. Pour suivre cette intrigue il faut se donner du mal et l’extraire d’un enchevêtrement de noms propres, de marques et de bouts de dialogues. A tel point que suivre l’histoire est un véritable défit tant on est aveuglé par les effets qui agissent comme un stroboscope la hachent et finissent pas la parasiter complètement. Trop c’est trop même lorsque l’on s’appelle Bret Easton Ellis – c’est vrai que ce nom est cool et puis il est premier dans le top 100 de Beigbeder quand même. Même si l’histoire vaut le détour – et encore ça se discute – le matraquage est bien trop présent. A petite dose ce style qui a fait la réputation de l’auteur américain joue son rôle en immergeant le lecteur dans la réalité, en lui en mettant plein la vue – d’autres avant lui comme Céline ou Manchette avaient utilisé un procédé similaire. A haute dose, il fragmente tellement l’histoire qu’elle devient tout simplement incompréhensible. Ce n’est donc pas son meilleur livre, loin de là. Dommage car il avait du potentiel.


Bret Easton Ellis, Glamorama, traduit par Pierre Guglielmina, 10 / 18, 2012, 786 p, Amazon.