Avec ce titre énigmatique faisant référence à la classification de Dewey, Sophie Divry nous immerge dans une conversation avec une bibliothécaire d’une cinquantaine d’année. Malgré son amour pour les livres, cette employée n’est pas heureuse de sa situation. Au contraire, elle développe un peu de rancoeur, un sentiment d’avoir laissé passer sa chance tant sur le plan professionnel que dans sa vie amoureuse. Elle part dans un long monologue et, de digression en digression, nous dévoile sa vie, nous fait part de ses pensées sur le monde qui l’entoure. Il y a beaucoup de nostalgie chez cette femme. Tout était mieux avant, elle voit d’un mauvais oeil le changement, le progrès technologique. Elle perd sa vie à en attendre une autre.

La bibliothèque représente pour nous tous lecteurs un cocon, un sanctuaire dans lequel se réfugier lorsque la vie nous pèse, nous blesse, nous deçoit ou tout simplement nous lasse. Mais la narratrice y est enfermée depuis trop longtemps, elle envie les autres. C’est maladif, son mal s’étend jusqu’au rayon de la bibliothèque, elle rêve de travailler au rayon histoire, elle est affecté à son voisin la géographie. Quelle vulgarité ce rayon, elle est même obligée d’y héberger les guides de voyages, c’est vous dire.

La construction de ce court texte – il fait à peine plus de soixante pages – est surprenante. Tout d’abord la narratrice semble s’adresser à quelqu’un mais on va vite douter de son existence. Ensuite, pour parler de la forme, il n’y a pas de chapitre. C’est un flot continu de texte qui fait parfaitement écho au flot de paroles déversé par notre bibliothécaire.

C’est un très bon divertissement, les réflexions de ce personnage sont lucides et parfois acerbes – ça fait du bien. Elle nous renvoie à notre propre vie, on se pose des questions et au final on en ressort revigoré et plein d’allant pour éviter les écueils dans lesquels elle est tombée.

Enfin, pour ne rien gâcher, il s’agit d’un très joli petit livre, très élégant au beau papier crème publié par une petite maison d’édition: Les allusifs. Le raffinement est certainement le mot d’ordre de cet éditeur car le livre m’a été adressé accompagné d’un marque page à son effigie et d’une note manuscrite.

Je remercie les éditions Les allusifs ainsi que Babelio de m’avoir fait parvenir ce livre dans le cadre du programme Masse critique.


Sophie Divry, La cote 400, Les Allusifs, 2010, 64 p, Amazon.