Ce livre est celui d’un anti-héros prénommé Harvey. Il est le propriétaire d’un magasin de bande dessinées, aime beaucoup la bière et est donc un peu bedonnant. Il passe le plus clair de son temps à soupirer et à se lamenter – il me fait un peu penser au vendeur de comics avec catogan des Simpson. La principale cause de ses lamentations est un cuisant souvenir d’enfance. N’allez pas croire qu’il était la tête de turc de son école, non, bien au contraire, il faisait partie à l’époque – puisque ce n’est plus trop le cas désormais – du clan des branchés. Sa principale occupation était, comme tout membre de ce club, de tyranniser un élève surnommé “Bleeder”. Tout était donc pour le mieux dans le meilleur des mondes jusqu’au jour où, comble des idées saugrenues, il a décidé de faire un échange avec ce souffre-douleur – d’où le titre du livre.
Cet échange d’une BD contre un objet quelconque semble somme toute assez banal. Objet dont il a d’ailleurs oublié depuis le nom et la fonction. Par contre, ce dont il se souvient très clairement c’est de la BD : le premier numéro de Superman. De quoi à avoir quelques regrets lorsque l’on sait – et il est bien placé pour – qu’un exemplaire peut se vendre pour 1 million de dollars. Sentant bien que cette histoire le mine et est la cause de tous ses problèmes, il décide de se rendre à la réunion annuelle des anciens élèves afin d’en avoir le coeur net.
Antony Moore – c’est un pseudonyme – est un psychanalyste anglais qui est manifestement doté d’un bon sens de l’humour. Ce livre est drôle, rafraîchissant et se lit comme une bande dessinée. Pour vous donner une idée du style voici ce que donne la description d’un réveil après une soirée un peu trop arrosée :
On aurait dit que quelqu’un s’était introduit dans sa bouche pendant la nuit et s’en était servi comme toilettes; il avait au fond de la gorge une matière inconnue et malodorante, et en même temps, une sorte d’humidité visqueuse et anormale sur la langue.
On ne s’ennuie pas un instant et on prend un plaisir malsain à suivre les aventures de notre malheureux héros. Une lecture très sympathique – et n’en attendez pas autre chose – qui me fait un peu penser à un livre que j’avais beaucoup apprécié il y a quelques années: Auteur en sursis1 de John Colapinto.
Antony Moore, Swap, traduit par Jean Esch, Liana Levi, 2010, 349 p, Amazon.