Voici un curieux petit livre, presque une nouvelle. Inclassable, insaisissable, original et troublant. C’est au départ l’histoire assez banale d’une journée de pêche entre amis. Nous sommes donc partis pour suivre ces trois hommes qui exercent le métier de psychiatre. Attention ce qui s’attendent à une promenade bucolique et ont, bien présent en mémoire, le fameux Et au milieu coule une rivière risquent d’être déçus. On est bien loin du charme simple de la journée au bord de l’eau. Très tôt dans le roman une indication est donnée, le temps n’est pas de la partie. Ca commence mal pour une partie de pêche et les les choses vont vite prendre une tournure étrange. Certaines pensées du narrateur vont peu à peu s’insinuer dans le récit, se matérialiser et venir se mêler à la réalité. Ceci m’a rappelé les “eidesis” de La caverne des idées. Il n’y a donc aucune frontière entre ce qui se passe dans la réalité et dans la tête du narrateur. Il raconte les choses comme il les perçoit sans distinction entre ce qui est réel et imaginaire. Ce n’est pas anodin car il peut parfois se passer des choses assez bizarres voire inquiétantes dans la tête des gens. Ici, cette autre face du miroir est exposée au grand jour, mêlée à la réalité afin de mettre en exergue le décalage parfois effrayant entre nos pensées et le monde qui nous entoure. C’est la rencontre fortuite avec la jeune fille du restaurant qui va être le déclencheur de ces visions – Ah ! les femmes.
Pour le reste, l’auteur se contente de nous faire deviner la vie de ces hommes par petites touches discrètes. Derrière le vernis on devine que tout n’est pas rose et le fait de le suggérer ne fait que renforcer cette impression. L’expérience est intéressante mais j’avoue avoir été parfois un peu perdu au cours de la lecture.
Je remercie les éditions Quidam ainsi que Babelio de m’avoir fait parvenir ce livre dans le cadre du programme Masse critique.
Paulus Hochgatterer, Brève histoire de pêche à la mouche, traduit par Françoise Kenk, Quidam, 2010, 110 p, Amazon.